Agnès Jaoui, Le goût des autres (2000)

Posted by Pierre Igot in: Movies
July 14th, 2004 • 10:49 pm

Bon petit film qui réussit — ce qui n’est pas rien — à nous attacher aux divers personnages, dans toute leur inconséquence.

Ce qui je trouve particulièrement réussi, c’est le foisonnement de petites intrigues parallèles. L’intrigue centrale est évidemment celle qui concerne Castella (Jean-Pierre Bacri) et Clara (Anne Alvaro), mais le film a le mérite de ne pas faire, comme c’est souvent le cas au cinéma, comme si le reste du monde n’existait pas. On change assez facilement de perspective et, au fond, tout est presque fait pour que l’intrigue entre Castella et Clara ne soit jamais le point central du film, même si ce serait conventionnellement la chose à faire.

Rien que pour cela, le film se détache et suscite une impression d’originalité. Il parvient à faire aimer ou en tout cas apprécier une vaste panoplie de personnages. Il n’y a personne de vraiment détestable ou « méchant ». C’est à tout le moins rafraîchissant.

Le film se dote également d’une dimension intéressante en la personne de Manie, interprétée par Agnès Jaoui, qui est aussi la réalisatrice et co-scénariste (avec Jean-Pierre Bacri) du film. On ne peut pas s’empêcher d’être séduit par cette femme et de voir dans son rôle dans le film une métaphore du travail de mise en scène dont elle est réellement l’auteur.

Tout ceci ne cache pas, cependant, les faiblesses qui empêchent ce film d’être vraiment réussi. La femme de Castella, par exemple, est une caricature un peu excessive. Mais surtout, il y a un grand point d’interrogation en ce qui concerne la vraisemblance du personnage de Castella lui-même, qui se découvre soudain une fibre artistique/esthétique en assistant accidentellement à une représentation de Bérénice. Le film essaye de maintenir l’équivoque en ce qui concerne ses motivations, puisque, comme le croit pendant longtemps Clara, il est fort possible que cette découverte n’en soit pas vraiment une et qu’il soit simplement tombé amoureux de l’actrice. Mais la fin du film semble indiquer qu’il y a bel et bien eu éclosion du « goût » artistique de Castella et que c’est cela qui va finir par séduire Clara.

On a quand même un peu de mal à y croire. Cela n’empêche pas de prendre du plaisir à regarder le film, mais cela limite sa portée, puisque cela ne lui donne pas vraiment l’épaisseur « sociologique » qu’il semble avoir l’ambition d’acquérir. Pour reprendre les mots de la quatrième de couverture du DVD, la « bousculade » des « cadres de référence et des barrières culturelles » n’aura pas vraiment lieu (ou plutôt il n’y a pas grand-chose à bousculer).

Cela ne peut que limiter l’ambition du film.


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