François Ozon, Sous le sable (2001)
Posted by Pierre Igot in: MoviesMay 10th, 2004 • 7:03 am
Je dois avoir ma dose de François Ozon pour un moment… Après 8 femmes et Swimming Pool, le hasard (plus ou moins) a voulu que nous regardions Sous le sable l’autre soir.
Des trois films, c’est sans doute le moins artificiel. Une histoire de disparition non acceptée, de deuil impossible à faire… Cela pourrait presque être « vrai », s’il n’y avait pas deux problèmes, l’un de forme et l’autre de fond.
Le problème de forme est l’emploi répété du procédé assez lourd de la mise en scène du personnage défunt comme s’il était encore vivant, comme manière d’illustrer l’incapacité dans laquelle l’héroïne se trouve de faire son deuil, d’accepter la disparition. Au début, cela passe encore, parce que, après tout, son mari a seulement semble-t-il disparu, il n’est pas encore officiellement mort. On comprend, d’une certaine manière, la tentation de l’illusion. Mais une fois que la disparition est avérée, que le corps est (sans doute) retrouvé, le procédé devient, pour le spectateur, inacceptable. À moins de virer franchement vers la voie de la folie. Mais s’il s’agit d’un film sur la folie, ce n’est pas vraiment une réussite. L’incapacité dans laquelle les proches (collègue, ami avocat, etc.) se trouvent de confronter l’héroïne à la réalité est peu vraisemblable. Je doute qu’une société comme celle dans laquelle l’héroïne semble vivre puisse laisser durer aussi longtemps la situation.
L’autre problème, vraiment de fond celui-là, est plus commun. Il s’agit du manque de justification de l’amour, auquel je reviens toujours. L’héroïne est présentée dès le départ comme étant profondément amoureuse de son mari. Mais il n’y a rien dans le personnage de ce mari, dans son apparence, dans sa personnalité, qui le rende aimable. D’où vient alors cet amour? On ne sait pas et on ne saura jamais. Et pourtant, tout le film repose là-dessus. Pour vraiment entrer dans la peau de l’héroïne, il faudra pouvoir comprendre — au moins en partie — son amour.
Aucun effort n’est fait par le cinéaste sur ce plan. Mais c’est très courant. La justification psychologique me paraît être quelque chose de très rare au cinéma. Je peux comprendre son absence quand il s’agit d’un choix délibéré. Mais il me semble que c’est l’attitude par défaut, que les films, en particulier aujourd’hui, reposent systématiquement sur des relations d’amour non justifiées, non expliquées. Cela les rend toujours moins intéressants qu’ils ne pourraient l’être. C’est le cas pour celui-ci.