Jean-Louis Murat, « Yes Sir » (Nice, 2009-04-11)

Posted by Pierre Igot in: French Stuff, Music
April 16th, 2009 • 11:06 am

Jean-Louis Murat semble s’être quelque peu réconcilié avec le Net ces derniers temps, avec une fine pluie d’inédits et de morceaux live qui refont surface sur son site et sur sa page MySpace.

Malheureusement pour les puristes, les morceaux des derniers mois, disponibles au format MP3 (et facilement téléchargeables) sur le site jlmurat.com, ont été remplacés par une petite horreur technologique estampillée MySpace, avec une interface pourrie et surtout une qualité de son nettement inférieure aux fichiers MP3 précédemment diffusés sur jlmurat.com.

De plus, plus moyen de télécharger facilement les morceaux, qui ne sont disponibles qu’en diffusion « en direct » (en streaming, en bon français) et, pire encore, sans le moindre dispositif de mémoire cache, de sorte que le navigateur est obligé de retélécharger le morceau à chaque fois qu’on veut le réécouter.

Beurk.

Cela dit, il suffit d’un logiciel de capture audio comme Audio Hijack Pro de Rogue Amoeba (pour Mac OS X) pour enregistrer les morceaux sous forme non compressée sur son propre disque dur. Ça n’aide en rien sur le plan de la qualité du son, mais au moins il y a moyen d’archiver les choses localement, en attendant l’hypothétique diffusion des morceaux concernés sur un support audio digne de ce nom.

Dernière offrande en date : un inédit intitulé « Avril », dépouillé et impudique à souhait.

jlmurat.com nous dit aussi que Murat est actuellement en studio en train d’enregistrer son nouvel album (en France ou aux États-Unis?) et qu’il reprendra bientôt la route.

Mais en fait, la vraie claque musicale du mois est à chercher sur le site leliendefait.com, qui nous tient généreusement au courant des dernières nouvelles et nous gratifie, à l’occasion, d’enregistrements « piratés » fournis par des fans.

Si vous vous rendez sur ce site, vous y trouverez en particulier un enregistrement audio/vidéo d’un inédit apparemment intitulé « Yes Sir », joué lors d’un concert récent à Nice (le 11 avril 2009).

L’enregistrement est hébergé sur le site DailyMotion, mais est classé comme étant « privé » et n’est donc disponible que via le site leliendefait.com. Peu importe : même en passant par le site leliendefait.com, il est facile de lancer le clip et puis d’attraper le fichier en téléchargement (avec un option-double-clic dans la fenêtre d’activité de Safari sous Mac OS X).

Cela vous donnera sur votre disque dur un fichier audio/vidéo MP4, encodé en H.264. C’est évidemment l’enregistrement d’un amateur dans la foule (merci !) et la qualité de l’image et du son est bien entendu limitée, mais n’empêche : le titre en question est un véritable monstre. Jean-Louis Murat est seul à la guitare électrique, distordue et craquante à l’envi. Les paroles (en français, à partir le titre-refrain-cri) sont mordantes, fortes et fragiles.

La structure du morceau est simple. Mais quelle efficacité ! Et quelle interprétation aussi… C’est du live, avec toutes les imperfections que cela suppose. Mais paradoxalement pour ce morceau, les imperfections contribuent presque à l’embellir. On atteint même un sommet dans cet enregistrement particulier avec la sonnerie du téléphone portable d’un con dans l’auditoire qui vient retentir au plein milieu d’un quasi silence.

Murat est suffisamment professionnel et expérimenté pour ne pas se laisser distraire, bien entendu, mais en même temps il remarque évidemment la chose pendant qu’il est en train de répéter les paroles de sa chanson : « Mon absence dans tout me fait perdre courage… ». Et la petite pause après « perdre », pour faire une grimace et rendre la sonnerie encore plus audible et plus agaçante, avant de lâcher enfin le dernier mot, « courage », et de reprendre une nouvelle fois la même phrase, dans un silence encore plus grand, est un moment si vrai, si désespéré, d’une certaine façon, qu’on ne peut qu’applaudir — ce que Murat invite généreusement le public à faire quelques moments plus tard, à la fin du morceau, quand il glisse un « Allô, t’es où ? » comique avant de déchirer l’espace d’un dernier puissant accord de guitare.

Le décalage entre la superficialité de ces vies d’imbéciles qui n’arrivent même pas à se souvenir d’éteindre leur portable avant d’entrer dans la salle d’un concert et la profondeur, la pureté, la vérité de cette vie d’artiste que Murat nous invite à partager, à explorer dans un morceau aussi simple et aussi essentiel n’aura jamais été aussi bien capturé.

On ne peut qu’espérer vivement que cet inédit fera surface, dans une version aussi épurée et pleine, sur une galette prochaine et qu’on pourra jouir de la composition dans toute sa splendeur, sans sonnerie de portable, même si l’on n’oubliera sans doute jamais cette toute première écoute dans le cadre approximatif d’un concert enregistré par un fan.

Oui, c’est le monde dans lequel on vit, et bravo à JLM qui continue d’oser être différent et malgré tout d’essayer de communiquer cette différence, de nous y inviter, au lieu de tout laisser tomber et de retourner à ses moutons, comme il est sans doute parfois (bien souvent ?) tenté de le faire.


Comments are closed.