Bernardo Bertolucci, Dernier tango à Paris (1972)

Posted by Pierre Igot in: Movies
August 10th, 2003 • 9:41 pm

Difficile de comprendre ce qui peut faire de ce film un “grand” film aux yeux de certains. Il a certes suscité la controverse à sa sortie, mais la controverse ne fait pas l’art. Elle y conduit parfois, c’est tout. Or, dans ce cas-ci, on ne voit pas vraiment le rapport entre le sujet de la controverse (les scènes de sexe) et la qualité du film. Il ne s’agit d’un film ni érotique ni pornographique. Il s’agit d’un film qui utilise, semble-t-il, le sexe pour faire passer un message autre. Mais lequel?

Difficile à dire, sachant que le cinéaste fait si peu d’efforts pour nous convaincre de l’intérêt de ses personnages. Comme trop souvent, malheureusement, la pauvreté ultime du film se situe au plan psychologique. On nous demande de croire que le héros souffre, sans nous le faire comprendre ni sentir. On nous demande de croire que l’héroïne est attirée par lui, sans nous le faire comprendre ni sentir. Ces personnages ne sont pas caricaturaux, ils sont vides. Dépourvus de toute épaisseur psychologique, ils passent d’une humeur à l’autre et nous sommes censés les suivre, les admirer, les envier, que sais-je encore.

Il n’y a rien d’exceptionnel dans la “performance” de Marlon Brando. On y trouve au contraire tout ce qui fait qu’il a si facilement basculé dans la caricature de lui-même: le côté “physique” poussé à l’extrême et gratuit; l’absence totale de légèreté; l’incohérence entre jeu et nature du personnage. Comment croire que le misérable époux d’une tenancière d’hôtel minable qui le trompait avec un des locataires puisse être d’une telle intensité? D’où cela sort-il?

La seule chose qui m’ait un peu amusé, c’est le va-et-vient entre l’anglais et le français (avec quelques bribes d’autres langues) — sauf que, pour d’autres personnages (comme celui de Marcel), la synchronisation entre la parole et le mouvement des lèvres était si mauvaise qu’on avait l’impression qu’ils étaient doublés. Jean-Pierre Léaud est fidèle à lui-même dans son jeu, même si son personnage est des plus invraisemblables.

La musique et la bande sonore en général donnent plutôt l’impression d’un fouillis que d’autre chose. On ne sait pas si le “tango” qui fait surface à la fin du film est censé être une métaphore ou pas. Je suppose que oui. Je m’en fous un peu.

Un dernier mot sur la scène de “sodomie au beurre”. Elle n’est choquante que si on y croit, c’est-à-dire si la réaction de la victime est réaliste. Or elle ne l’est pas du tout. Le film reprend tout de suite après comme si de rien n’était. Alors à quoi bon cette scène? (À cet égard, la scène “inverse” où le héros est cette fois la “victime” de la femme est encore plus gratuite.)

En fin de compte, la conclusion est simple: dans ce film, le sexe ne mène à rien (de bon ni de mauvais). L’héroïne finit par tuer le héros non parce qu’il l’a violée mais parce qu’il lui colle après. Un bon coup de pied dans les couilles aurait sans doute suffi.


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